Le tatouage depuis la nuit des temps

Publié le 17 mai 2024 à 16:48

la plus vieille trace

Bien que longtemps considéré comme un art réservé aux marginaux, le tatouage est aujourd’hui démocratisé.

En France, 1 personne sur 10 est tatouée.

Cet art ancestral est apparu sous différentes formes depuis l’époque de la préhistoire.

 

En 1991, dans les Alpes, à la frontière italo–autrichienne, fut découvert le premier homme tatoué.

Les études ont montré qu'Ötzi était un homme d'environ 45 ans qui mesurait 1,60 mètre pour un poids de 50 kilogrammes, qui avait les yeux bruns et les cheveux noirs. Sa mort se serait produite vers la fin du Néolithique, autour de 3300 avant notre ère, soit il y a quelque 5.300 ans.

On le nomme Ötzi,.

 Il était orné de 61 tatouages. Les scientifiques ont déduit que ses tatouages, de simples traits noirs, étaient à but curatif de par leurs emplacements au niveau des articulations, essentiellement sur les jambes. On suppose donc un soin contre l‘arthrose. Ces tatouages étaient faits de petites incisions puis frottées avec du charbon de bois.

Le tatouage est présent dans de nombreuses cultures antiques telles que la culture celte, égyptienne, japonaise, polynésiennes.

 

L’origine du mot Tatouage

 Si, en français, le mot tatouage vient du terme anglais tattoo, ce dernier provient pour sa part de beaucoup plus loin. Pour y retrouver les origines, il faut voyager au cœur de l’océan Pacifique sud, sur la petite île de Tahiti. L’expression est une déformation du mot tahitien tatau signifiant marquer, dessiner ou frapper.

S’il est parvenu jusqu’aux oreilles des Européens, c’est grâce à l’explorateur et cartographe britannique James Cook, rendu sur l’île en 1772. 

 

C’est le docteur Berchon, traducteur de l’explorateur, qui exportera ce mot vers la France, avant que celui-ci ne se transforme en tatouage. 

En 1798, il est introduit dans le Dictionnaire de l’Académie française, puis dans le Littré 65 ans plus tard. 

Aujourd’hui, le Larousse apporte deux définitions au mot tatouage :


-Introduction par scarification jusqu'au niveau du derme d'un ou de plusieurs colorants formant un dessin bien déterminé.
Marque, inscription, dessin indélébiles pratiqués sur la peau à l'aide de piqûres, de colorants.

 

-Sa pratique ancestrale semble remonter à -1 300 avant JC. C’était un rite utilisé pour marquer les étapes importantes de sa vie. On marquait la peau a l’aide de dents de requin ou d’os taillés avec de l’encre de charbon. Le tatouage était également une marque sociale, essentiellement pratiquée par les classes supérieures.

Un art marginal

Pour remonter aux sources du tatouage à Rome, il faut commencer par rendre visite aux Parthes. En effet, ils avaient l'habitude de tatouer les esclaves, les détenus et les prisonniers de guerre, en leur inscrivant des lettres sur le front, afin de prévenir toute tentative de fuite. Les Grecs, qui jusque là ne voyaient dans cette pratique qu'une coutume barbare des pays voisins, l'adoptèrent à leur tour, dans le même but punitif : ils commencèrent à tatouer le visage de leurs esclaves, et Platon fait allusion, dans son traité "Les Lois", au tatouage du front et des mains "pour l'étranger ou l'esclave coupable de vol d'une chose sacrée. Ce marquage s'accompagne d'une série de mesures qui tendent à rejeter le sacrilège hors de la ville. Fouetté d'autant de coups qu'il plaira aux juges, il est jeté, nu, hors des limites du territoire." ("Les Lois", Platon, 9-854d). Le mot employé par les Grecs, "Stigma", signifiait à l'origine "marques de serpents", mais il prit bientôt un autre sens, désignant des marques honteuses - comme notre "stigmate", parfois encore dans cette même acception.

Dans la Rome antique, on se servait des tatouages pour marquer les criminels et les esclaves. Ces derniers étaient souvent marqués au centre du front par les initiales du nom de leur maître. C‘était également une manière de valider une transaction lorsque des esclaves étaient achetés par des étrangers. 

Les gladiateurs arboraient des tatouages faciaux dans le but d‘effrayer leurs adversaires, des motifs religieux ou encore des personnages mythiques protecteurs.

Le Japon

Les plus anciennes traces de transformation corporelles sont retrouvés sur des statuettes de l'ère  Jômon (de 13000 à 400 av.J.C)

C'est a partir de XVI° siècle que les guerriers japonais porte sur le dos l'emblème de leur clan afin de permettre l'identification de leur corps.

en 1742 à l‘époque d‘Édo, le tatouage,  est signe de punition, les criminels étaient tatoués de force sur les bras ou le front. 

 

À partir de XVII°, siècle, le tatouage japonais acquière, par rapport à l'occident, une virtuosité technique.

La sortie du roman Suikoden, en 1773, qui raconte les aventures de 108 hors-la-loi dont le tatouage tient une place prépondérante comme forme de contestation du pouvoir, connaît un immense succès populaire.
Les Japonais se recouvrent le corps de mythes et de légendes, avec par exemple des dragons et des samouraïs, inspirés des illustration du livre.

 En 1872, cette pratique devient totalement interdite jusqu‘en 1948 pendant l‘occupation américaine.

 

 Le tatouage est encore aujourd’hui mal perçu au Japon car il est souvent affilié aux yakouza, les gangs japonais.

Beaucoup de lieux publics tels que les Onsen, bains chauds traditionnels, interdit l’accès aux personnes tatouées.

La Russie

En Russie, dès 1922, le tatouage a pris beaucoup d‘importance dans les prisons et les goulags. La pratique du tatouage permettait, par un système très codifié, de retracer le parcours criminel des prisonniers. Il permettait grâce au nombre et à la signification des tatouages d‘instaurer une certaine hiérarchie dans les prisons. Les forces de l‘ordre finirent par apprendre à déchiffrer les symboles à partir des années 1960, démasquant dès lors les porteurs.

Photographies des encodages cutanés des prisonniers soviétique entre 1989 et 1993 par Sergei Vasiliev.

Partout dans le monde occidentale

Utilisé par les prisonniers et les prostitués, le tatouage est mal vu, les personnes tatouées se font traiter de bêtes de foire et sont utilisées dans les Freaks Show comme divertissement du XIXe au XXe siècle.

Artoria Gibbons en 1920.

Première femme tatoueuse au état unis (1907)

Le tatouage, une pratique rituelle

en Afrique du Nord

Dans la tradition Berbère, on retrouve l'idée du tatouage qui permet d'écarter le mal de soi, de soigner la maladie et d'éloigner le mauvais œil.
Il est esthétique, il préservait la vertu et prouvait l'appartenance de la femme à son époux.

En Asie

Le tatouage avait, dans de nombreux pays et dans nombreuse ethnies, un rôle de distinction, de protection, mais aussi de domination sur les femmes.

Les tatouages peuvent être liés à des croyances.
Il a donc un rôle protecteur contre les esprits, les monstres, les maladies, la mort...C'est une protection de l'âme.

Ils peuvent être liés à la pratique des arts martiaux, comme une amulette protectrice pour les combattants.
Ils peuvent aussi être thérapeutiques. 
Le tatoueur est alors herboriste et chaman.

Outil de Tatouage Birman

Les tatouages peuvent avoir une relation avec la religion, leur sexe ou leur voisinage, mais les tatouages remplacent souvent les bijoux. Pour certaines populations, le tatouage est une nécessité pour le groupe, pour d’autres, c’est une façon d’habiller le corps nu.

L'Océanie

Ce qui nous emmène au "triangle polynésien " qui regroupe, Hawaï, la Nouvelle-Zélande, l'Ile de Pâques, les Fidji, Tonga, Marquises et Tahiti.
Dans cette région, les mythes et les traditions ont construit un imaginaire dans lequel le tatouage recouvre et habille le corps.

 

Claude Lévi-Strauss : "Il fallait être peint pour être un homme : celui qui restait à l'état de nature ne se distinguait pas de la brute."

Contrairement à de nombreuses sociétés, les peuples d'Océanien ont institutionnalisé la pratique tu tatouage, qui garantit leur identité.
Le tatouage augmente le mana de son porteur, c'est-à-dire sa puissance magique.

L'Arctique

La méthode utilisée chez des Inuits du cercle polaire arctique, consiste à reproduire sur la peau un geste de couture.
À l'aide d'une aiguille trempée dans une substance colorante qu'on fait passer sous la peau en y laissant une trace
Chez la femme (principalement au visage) le tatouage est incontournable. Il est gage de beauté, vertu et de force.
Il témoigne également de sa maturité physique et sociale de la porteuse.
Le tatouage a également des vertus thérapeutiques et magiques pour tous les membres du groupe.

l'Amérique du Nord

Cher les native americans, pratiquaient des décorations éphémères, telles des peintures de guerres ou pour des cérémonies traditionnelles été très fréquent pour des événements occasionnels.
Mais ils pratiquaient également des modifications irréversibles (tatouage, piercing ou scarification) pour marquer une étape importante dans leur vie.
Toutefois, on retrouve le tatouage dans beaucoup de tribus et chacune a ses significations propres.
Ses tatouages on tout de même des similitudes.
On retrouve la matérialisation guerrière, des trophées ou encore la protection.
On note aussi des tatouages sur les défunts pour leur permettre de rejoindre l'autre monde.
Il y avait également des tatouages prophylactiques qui favorisaient la fécondité.

Démocratisation

En 787, en Europe, le tatouage fut interdit par l‘Église car considéré comme une pratique païenne. On peut le lire dans l‘Ancien Testament où il est écrit :

 

 » Vous ne ferez point d’incision dans votre chair pour un mort, et vous n’imprimerez point de figures sur vous. Je suis l’Eternel. « 

 

C‘est au XVIIIe siècle que celui-ci refait surface grâce aux marins qui, après avoir redécouvert les tatouages polynésiens, s‘en servent pour marquer, lors des longs voyages en mer, leurs corps de motifs. Cette pratique leurs permettait de raconter une histoire, une aventure ou encore d’illustrer une personne importante.

 Ce fut seulement à la fin des années 1900 que le tout premier salon de tatouage ouvrit ses portes en Europe. La première machine à tatouer électrique existait déjà depuis décembre 1891, créée par Samuel O’Reilly.

C‘est dans les années 70 que le tatouage se répand réellement grâce aux générations punk, rock et bikers, qui lance la mode mauvais garçon aux États–Unis, comme en Europe. Mais bientôt les stars de la musique vont lui donner une image « cool«  et le tatouage rentrera dans la pop culture.

Signification

Le tatouage et ses significations ont donc énormément évolué au fil des siècles. Il a d’abord eu des vertus de guérison puis a servi à démontrer son appartenance à un groupe. Il a également servi dans un but de protection comme avec le Sak Yant réalisé de manière traditionnelle par des moines bouddhistes initiés.

 

 Le tatouage a également servi à marquer les prisonniers et les marginaux de la société afin de les différencier. Il peut également raconter une histoire, un vécu ou encore être un signe de rébellion, de protestation.

Aujourd’hui encore on peut choisir le tatouage pour sa signification, son appartenance à un groupe, dans un but protecteur, mais il peut également être purement esthétique. Beaucoup d’artistes tatoueurs sont choisis pour leurs styles ainsi que leurs créations uniques.

Quelles dates à retenir

3300 avant J.C. : Ötzi meurt. Lorsqu’on le retrouve des millénaires plus tard, on constate qu’il était tatoué.
2160 avant J.C. : en Égypte antique, on trouve trace d’un tattoo sur cuisse représenté sur un dessin du dieu Bès.
312 avant J.-C. : l’empereur Romain Constantin se convertit au christianisme et, dans la foulée, prohibe le tatouage.
1774 : en Polynésie, l’explorateur James Cook fait la rencontre d’autochtones aux peaux tatouées.
1800 : le général britannique Earl Robert exige que chaque officier soit "tatoué avec les armoiries de son régiment". La déclaration contribue à populariser le tatouage chez les marins et les soldats.
Années 1870 : le tatouage gagne en popularité dans d’autres couches de la société, notamment grâce à Edouard VII, tatoué.
1891 : l’Américain Samuel O’Reilly fait breveter la première machine à tatouer électrique.
1894 : selon plusieurs sources, la mère de Winston Churchill se serait fait tatouer un serpent.
1961 : le département de la santé de New York proscrit les tatouages par peur d’une épidémie d’hépatites B. La prohibition ne sera officiellement levée que 36 ans plus tard.
Années 1970 : les motards popularisent à leur tour le tattoo.
1974 : le tatoueur Don Ed Hardy ouvre à San Francisco le premier salon aux États-Unis proposant des tatouages personnalisés et sur rendez-vous.
1976 : la première convention de tatouage est organisée à Houston, au Texas.
1992 : l’Alliance of Professional Tattooists est créée pour traiter des questions d’hygiène et de sécurité.
2014 : le mot dermographe fait son entrée dans le dictionnaire Robert.

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Commentaires

Hulot Marie
il y a 4 mois

Waouh super intéressant! 😍😍

Marie
il y a 4 mois

Très intéressant article, riche d'informations
On sent ta passion Jäa 😊

Maï Lys
il y a 4 mois

Yeah j ai appris plein de trucs, merci Jäa !! 😉😎

Drouet
il y a 4 mois

Vraiment très intéressant. On partage ta passion à travers l'histoire. Super voyage.
Merci Jaa
On attend la suite....

Sophie Malbranque
il y a 4 mois

Merci Jaa pour cette histoire du tatouage dans le temps et dans le monde. C'est tout à fait passionnant ! Après l'histoire de ta vie qui l'était tout autant. Bravo pour tout ce que tu fais et pour ce blog.