Nous avons vu dans nos précédents articles que selon l'époque et les différentes cultures, il existe plusieurs façons d'insérer le pigment dans la peau.
L'insertion de l'encre dans la peau
Nous avons vu que la peau est divisée en trois couches : le derme, l'épiderme et l'hypoderme.
Pour une pigmentation optimale, nous avons vu que l'insertion du pigment se fait dans la deuxième couche.
La première étant le derme, qui se renouvelle régulièrement, il ne permettrait pas aux tatouages de rester de manière indélébile.
En se renouvelant, il effacera également les pigments.
Dans la deuxième couche, l'épiderme, c'est l'endroit idéal pour que l'encre reste de façon indélébile dans la peau.
L'hypoderme quant à lui est beaucoup trop profond. L'encre mute et se diffuse dans le corps, ce qui donne un aspect de trait pas droit qui fuse et qui est flou.
Au fur et à mesure du temps, les tatoueurs ont appris à insérer le pigment à l'endroit, le mieux adapté pour que les tatouages restent dans le temps.
Les différents outils
Selon la culture et les endroits géographiques, l'homme a inventé différents outils.
Nous allons faire rapidement un tour du monde pour faire un panel de tous les outils qui ont pu exister.
En Polynésie, les outils de tatouage traditionnel étaient composés d'un peigne aux dents en os ou en écailles de tortue, fixé à un manche de bois. Les dents étaient trempées dans une encre à base de charbon de noix diluée dans l'huile ou dans l’eau.
Au Japon, on utilise des fines aiguilles, de l'encre de charbon et des pigments de couleur. L'outil du tatoueur est une sorte de manche en pointe, en général en métal, mais autrefois en bambou, au bout duquel sont insérées les aiguilles.
Dans beaucoup cultures, on utilisait tout simplement une épine, un bout d'os, des arêtes de poisson, ou autre, qu'on tremper dans de l'encre et ont piqué la peau.
Cette technique est toujours utilisée de nos jours, cela s'appelle du hard pack, mais aujourd'hui, nous utilisons des aiguilles stériles à usage unique.
Chez les Inuits, la technique était de prendre une petite aiguille dans laquelle était enfiler un fil qui était trempé dans une mixture de pigments, et ensuite elle était enfilé dans la peau en laissant le pigment.
1891 : invention de la machine à tatouer électrique à bobine
Le tatoueur américain Samuel O’Reilly est le premier inventeur d’une machine à tatouer électrique. Il s’inspire du stylo électrique, créé quelques années plus tôt par Thomas Edison, auquel il ajoute des aiguilles et un tube permettant d’insérer de l’encre dans la peau.
Une machine de tatouage à bobines utilise un courant électromagnétique. Chargées d'électricité, les bobines attirent la masselotte vers le bas attirant ainsi le faisceau d'aiguilles dans la peau. Le fait que la masselotte soit en bas, la connexion entre la vis de contact et le ressort avant est rompue.
1978, Invention de la machine Rotative
En 1978, Kohrs a présenté le premier nouveau design pour une machine rotative depuis près d'un siècle. Sa machine était fonctionnellement similaire à celle d'O'Reilly, sauf que les aiguilles étaient actionnées par un moteur électrique à courant continu plutôt que par des aimants électrifiés. Cette version plus fine et rationalisée était plus légère, plus silencieuse et plus portable. Elle permettait également aux artistes d'avoir un meilleur contrôle tout en veillant à ce que les mains et les doigts de l'opérateur aient moins de crampes. Si certains artistes se sont tournés vers ce renouveau rotatif, d'autres ont préféré s'en tenir à leurs fidèles machines à bobines
Depuis 1991, nous avons perfectionné nos machines à tatouer et avec cette évolution. Nos techniques ont bien progressé et les tatouages sont de nos jours bien plus perfectionnistes qu'à l’époque.
Le temps a bien évolué, et les machines aussi.
La maîtrise des différentes profondeurs de pique a fait énormément évoluer les techniques.
Évidemment que chaque tatoueur a appris la profondeur de pique afin d'obtenir un perfectionnement de son art.
Mais il faut savoir que le corps humain est une toile vivante, et que peau a des propriétés différentes.
Elle peut être plus ou moins fine, plus ou moins sèche, plus ou moins élastique.
L'âge de celle-ci peut aussi faire varier la nature de celle-ci.
Les endroits du corps peuvent également être différents.
La peau la plus proche des os est forcément plus fine.
Le tatouage n'est donc pas une science exacte.
Et la sensibilité de l'endroit du tatouage est différente.
Chaque personne ne réagit pas pareil à la douleur, et chaque endroit est plus ou moins sensible.
Les encres de tatouages
Nous savons dorénavant que le tatouage, cette pratique, d'injecter de l'encre, sous la surface de la peau est très vieille.
Nous avons découvert que le tatouage pouvait être un signe d'appartenance, spirituel, de guérison, de protection, esthétique, ou même plus actuellement de l'ordre du médical.
Le premier pigment à avoir à être utilisé était le noir.
La première composition de ses premières encres variait très peu. La plupart utilisées de la suie et du charbon comme pigment primaire. Les couleurs comme le rouge, le brun et le jaune ne sont apparus que plus tard.
Les historiens pensent que les premières couleurs étaient surtout composées de minéraux, de plantes et des produits d’animaux.
L'évolution des pigments dépend donc de l'histoire du tatouage et de sa signification pour chacune des cultures.
L'Egypte antique
En découvrant à El Bahari, les vestiges momifiés d'une femme présentant des tatouages sur leur abdomen et sur leurs cuisses. Ils ont également découvert que ces signes représentaient le dieu Nés (dieu de la fertilité).
Ces tatouages étaient faits afin de protéger la femme et l'enfant à naître.
Les recherches ont également permis de découvrir qu'ils étaient faits à base de suie de maternelle.
Ils étaient introduits dans la peau avec une aiguille attachée à un bâton de bois.
Les Égyptiens tracés d'abord les dessins avec une lame et y frotter l'encre afin de laisser une trace indélébile.
Les Grecs et l'empire romain
Les Grecs aussi pratiqués une forme de tatouage, mais pas comme protection, mais pour marquer les esclaves et des criminels.
Aetus, un médecin romain, fut le premier à écrire la recette de l'encre dans ses journaux.
la composition était d'Écorce de sapin égyptien et du bronze corrodé combinés à du vinaigre, des gale (déformations de croissance induites chez certaines plantes par divers insectes) et du vitriol (acide sulfurique).
Les guerrières Celtiques et Pictes
Avant la montée du christianisme, les Romains avaient observé les tatouages décoratifs complexes sur le corps des guerrières, celtiques et pites.
Leurs tatouages avaient une teinte bleutée. Pour créer cette teinte bleutée, ils utilisaient les feuilles de pastel une feuille à fleurs, qui pousse partout en Europe et en Asie occidentale.
Il est séché et les faisait bouillir deux fois afin de former une pâte épaisse et visqueuse que l'on introduisait ensuite dans la peau à l'aide d'une aiguille.
Le Japon et Lorient
Ce sont les artisans de gravure sur bois, qui se sont réinventé en tatoueur, et qui utiliser les mêmes outils qu'il prenait pour graver le Bois.
Ils utilisaient également la même ancre connue, sous le nom de Sumi, de la cité de Nara.
La couleur de cette encre singulière avait la propriété de se modifier en teinte bleu-vert, lorsqu'elle était insérée sous la peau.
Cette encre était fabriquée à partir de branche de pin, sélectionnée à la main et de col d'os. Les tatoueurs brûlés les branchent avec de l'huile de sésame, recueilli la suie manuellement et pétrissaient le tout avec de la colle d'os pour former une pâte. À cette pâte, ils ajoutaient des essences et la formaient en petit bloc qu'il faisait sécher pendant plusieurs mois, voire des années. Ces blocs étaient finalement émincés et mélangés à de l'eau pour créer une ancre liquide. Plusieurs usines de Nara se spécialisent encore dans la fabrication de cette encre unique.
Les tatouages marins et les militaires
C'est grâce à eux que le tatouage est arrivé en Occident. L'origine du mot tatouage qui est dérivé du mot polynésien Tatau.
Les marins, le pratiquaient, comme passe-temps, lors des longues traversées en mer.
Pour l'encre, ils utilisaient ce qui leur était accessible : de la poudre à canon et quelques fois de l'urine.
L'évolution des encres de tatouage
Avec l'arrivée des machines mécaniques, la pratique du tatouage a connu un regain de popularité et d'influence. Le processus n'était plus aussi laborieux et douloureux qu'autre fois, et de plus en plus de gens demandé des pigments plus clair et plus résistant.
Les artisans tatoueurs mélangés leur propre encre, mais avec la demande croissante, des fabricants d'encre se spécialise et commence à faire l'apparition sur le marché.
Au début, les pigments se vendaient sous forme de poudre. Les tatoueurs se servaient souvent de plomb et devaient mesurer des quantités précises de pigment et d'eau distillée pour produire de l'encre liquide.
Les artistes commandaient leurs pigments en gros, directement chez les importateurs. Certains préféraient leur propre encre. Il travaillait à même les pots de pigments ne connaissant pas encore les dangers de la contamination croisée.
La première encre pré mélangé développé par le fournisseur Milton est apparu sur le marché en 1950 bien que le processus de celui-ci n'était entièrement adopté qu'en 1970.
Composition chimique des encres d'aujourd'hui
Les encres de tatouage sont des produits complexes composés notamment de pigments insolubles, de substances liquides comportant un liant et un solvant, d'additifs visant à stabiliser les pigments, et enfin de conservateurs destinés à prévenir la contamination du produit.
Plusieurs entreprises offrent aujourd'hui, une grande variété d'encre pré mélangé pacifiquement conçue pour le tatouage.
Nous avons accès à pratiquement toutes les couleurs de l’arc-en-ciel.
On peut même les mélanger entre elles pour pouvoir avoir des teintes parfaites.
Ces encres sont vendues, stérilisées et peuvent être versés dans des capsules à usage unique, afin d'éviter la contamination croisée.
Ces encre pré mélangé ne sont pas réellement des encres.
En fait, c'est un pigment suspendu dans une solution porteuse.
Cette solution est un liquide inerte qui maintient les différents pigments ensemble, les désinfecte et en facilite l’application.
Selon la marque de la solution porteuse, celle-ci peut continuer de l'éthanol, de l'eau, purifiée, de l’Hamamélis de Virginie, de la glycérine ou un mélange de l'un ou d'autres de ses liquides.
Quant aux piments, ils peuvent être composés de sels minéraux, de plantes ou de plastique (acrylique) ou la combinaison des trois.
Mais un pigment REACH, c’est quoi ?
REACH 2022 vise à réglementer la composition des pigments utilisés en tatouage en interdisant certaines substances. Entre autres, les colorants azoïques, amines aromatiques, hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), métaux et méthanol présents dans les pigments de tatouage et de maquillage permanent. L’objectif est donc de garantir une procédure de modification corporelle plus sûre pour la santé.
Que dit la réglementation ?
Jusqu'en 2023, les règles françaises suivent les recommandations de la ResAP(2008)1 du 20 février 2008 sur les exigences et les critères d’innocuité des tatouages.
Le règlement européen 2020/2081 du 14 décembre 2020 introduit, dans le règlement REACH, qui impose des conditions ou exigences spécifiques aux produits mis sur le marché européen, de nouvelles restrictions visant les substances et les pigments contenus dans les encres de tatouage.
NB. Les produits conformes ("REACH compliant") peuvent être retrouvés dans la base de données du CTL (Chemical Technological Laboratory).
La loi française définit un produit de tatouage comme une "substance ou préparation colorante destinée, par effraction cutanée, à créer une marque sur les parties superficielles du corps humain" (Articles L510-10-1 à L513-10-10 du Code de la santé publique).*
Depuis le 1er janvier 2024, elle a intégré les conditions du REACH dans sa réglementation d'application :
- fabrication, laboratoire, conditionnement et importation des produits (Art. R513-10-1 à R513-10-3 du CSP) ;
- composition des produits, et notamment les substances interdites ou soumises à des restrictions spécifiques (Art. R513-10-4 du CSP) ;
- étiquetage des récipients et des emballages (Art. 513-10-5 du CSP) ;
- vigilance exercée sur les effets indésirables, avec un système national impliquant à la fois l'ANSM et les autorités sanitaires, mais également les professionnels de santé, les fabricants et les distributeurs, ainsi que les tatoueurs, et bien sûr les tatoués (Art. R513-10-6 à R513-10-13 du CSP).
Les distributeurs français doivent être garants de la traçabilité et de l'étiquetage de ces encres, et sont soumis à des règles strictes, notamment avec un dispositif de déclaration à l'ANSM et un suivi annuel assuré par les DDPP.
* Les sanctions applicables aux infractions relatives aux produits de tatouage sont définies aux articles L5437-1 à L5437-5 du Code de la santé publique.
Les autres références règlementaires fixent :
- les bonnes pratiques de fabrication (Arrêté du 15 septembre 2010) ;
- les bonnes pratiques de laboratoire (Arrêté du 23 juin 2011) ;
- les informations à transmettre aux centres antipoison (Arrêté du 31 mai 2016) ;
- la qualification des personnes responsables de la fabrication, du conditionnement et de l'importation des produits (Arrêté du 19 août 2016).
Si j’ai été tatouée avant le 4 janvier 2022, ai-je mis ma santé en danger ?
..."Le recul sur le terrain n'a relevé, à ce jour, aucun effet toxicologique qui ne serait plus élevé chez les populations tatouées comparativement aux non-tatoués : Un constat de fait qui ne satisfait évidemment pas les scientifiques.
La toxicologie des encres reste mal définie, car elle constitue un modèle unique dont de nombreux aspects restent inconnus : on introduit dans la peau une dose fixe à vie, la quantité est limitée, et il n'y a alors plus d'exposition répétée à de nouvelles doses comme c'est le cas avec la plupart des cosmétiques ou tout autre environnement ayant un potentiel toxique en fonction du dosage.
Différentes initiatives s'inscrivent dans la volonté de tendre vers une meilleure connaissance des produits de tatouage : systèmes nationaux de vigilance, consultations médicales dédiées aux complications, exigences et traçabilité des distributeurs nationaux... Pour autant, la tendance au principe de précaution et le manque de données poussent aussi les réglementations européennes à définir de manière arbitraire des critères communs sans prise en compte des réalités du terrain et des contraintes techniques.
Force est de constater que les allergies, qui restent assez rares et sans gravité, constituent le problème le plus récurrent ; Le flou entretenu par les industriels fournissant les pigments (CI = Color index) et la transparence relative des fabricants, sous couvert de secret commercial, reste les principales zones d'ombre qu'il conviendrait d'éclaircir"...
Extrait d'un article du S.N.A.T
https://syndicat-national-des-artistes-tatoueurs.assoconnect.com/page/86340-encres
Quoi qu'il en soit, le moyen le plus fiable pour un tatoueur soucieux d'utiliser des encres conformes est de s'adresser à un distributeur français.
Merci de me laisser une petite note, cela va m'aider pour les prochains articles.
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Commentaires
Tu nous apprends plein de choses, c'est super intéressant de partager. Merci pour les news
Très intéressant, comme toujours ! ;)
Vraiment, tes articles sont fournis, très riches en informations très intéressantes.
On pourrait presque se former !
Bises
Merci pour tes dossiers toujours passionnants. On apprend plein de choses.